20 août 2006

Point presse

Salut à tous ! Bon, alors, pour ceux qui regardent les infos ou écoutent RFI, ils doivent se faire du souci… Donc voilà un message destiné à rassurer tout le monde : je vais bien.

Pour ceux qui ne savent pas ce qui se passe dans mon quartier, voilà un rapide briefing : des élections ont eu lieu en RDC fin juillet 2006, quand je suis venu en vacances en France en coup de vent.
Ces élections, les premières depuis l’indépendance (mais en fait il n’y avait jamais eu d’élections avant l’indépendance…) en 1960 se sont bien passées. Pour vous donner une idée, le pays est grand comme l’Europe de l’Ouest, et bénéficie de 2000km de routes goudronnées… 20 millions d’électeurs (je crois) et de très nombreux candidats à la présidence.

Parmi eux : Joseph Kabila, fils de son père, Laurent-Désiré Kabila (Lolo avait pris le pouvoir suite à la guerre civile. Quand il a été assassiné en 2001, Joseph a pris la suite… il avait 30 ans), et Jean-Claude Bemba, avec une tête de gros bébé mais toute une milice avec lui, c’est un chef de guerre qui n’a jamais reculé devant les moyens pour parvenir à ses fins. On attendait Kabila favori, et Bemba derrière. Tout ce petit monde et ce petit processus électoral était encadré par l’ONU, par le biais de la Mission d’Observation des Nations Unies au Congo, alias MONUC. Cette MONUC est placée sous le chapitre VII de la Charte des Nations Unies, ce qui l’autorise à utiliser tous les moyens nécessaires pour dissuader les groupes armés de recourir à la force. On appelle ça un mandat « musclé », comme par exemple ce n’est pas le cas au Liban. En plus de la MONUC, l’Europe a envoyé une bande de gros bras, des gars qui sont là pour taper et récupérer les expats, l’EUFOR. Ces derniers ne sont censés intervenir qu’en dernier recours ,sur demande de la MONUC, après :

1) la police congolaise
2) l’armée congolaise
3) la MONUC (17.600 hommes, quand même, hein…)

Les résultats étaient attendus pour hier soir à 21h, heure française. Cependant, des coups de feu ont été tirés, et la Commission Électorale Indépendante (CEI) a plus ou moins été assiégée. Visiblement, des dérapages isolés… Bref, le chef de la CEI a été emmené avec gilet par balle dans un blindé de la MONUC jusqu’à la télévision, pour annoncer les résultats avec deux heures de retard : Kabila = 45%, Bemba = 20%, donc un deuxième tour en perspective, prévu a priori (mais il ne faut pas trop s’y fier) pour fin octobre.

Bref, la nuit est passée… et ce matin, rebelote, au siège de Bemba, cette fois-ci. Toute la journée, des tirs ont eu lieu, entre la police, la garde présidentielle (de Kabila, actuellement au pouvoir) et les militaires soutenant Bemba. Personne ne sait au juste ce qui s’est passé pour qu’on en arrive là, mais le résultat c’est qu’en fin d’après midi on tirait à l’arme lourde sur sa résidence.

Bref, c’est un peu le chaos. Pour l’instant, pas de débordement grave (cf. le site de la MONUC, et notamment cet article), l’EUFOR est déployée (à tout hasard) mais n’est pas intervenue.

Bref, c’est l’incertitude. Est-ce que Bemba va être tué ? Capturé et jugé pour complot ? Est-ce que les tirs vont s’arrêter, et tout va rentrer dans l’ordre ? Personne ne sait, peut-être que demain les choses seront plus claires.

En attendant, je ne suis pas à Kinshasa, ni même en RDC, je suis à Brazzaville, au Congo du même nom. Tout est calme ici, et nous avons prévu d’aller au restaurant ce soir. Pas trop près du fleuve tout de même, quelques balles perdues avaient fauché deux ou trois promeneurs lors des derniers « événements » de l’autre côté.

J’attends de savoir si :
1) je retourne travailler à Kinshasa car tout va bien
2) je reste travailler pour Kinshasa depuis Brazza en attendant de voir ce qui se passe
3) on arrête Kinshasa et je rentre en France (mais ça, ça me semble pas très probable, hein)

En tout cas, pas de souci pour moi, à Brazza tout va bien, les gens sont gentils, la ville est belle et la nuit est calme. Pas de risque de contagion des problèmes, ils sont trop occupés de l’autre côté pour penser à faire des ennuis ici. Les seuls choses à prévoir, en fait, ce sont les réfugiés qui ne manqueront pas d’arriver si ça tourne en guerre civile. Mais on n’en est pas là. Pas encore. Les vols à destination de la France sont maintenus, et tou va quand même comme d’habitude.

Si vous voulez des infos, je vous invite à vous brancher sur RFI, que vous pouvez écouter à Paris avec la radio, ou par internet sur leur site www.rfi.fr, et vous sélectionnez à gauche « direct : RFI Afrique », et vous en saurez autant que moi. Bien sûr, vous pouvez aussi regarder LCI, La Chaîne d’Information, possédée par Bouygues, si je me fais chopper à faire de la pub pour eux je me fais virer.

Sur ce, je vous souhaite une bonne nuit, et rendez-vous à la prochaine émission !